LE ROI BLANC DES PATAGONS de Saint-Loup.


Réédité en 1996 par un éditeur ami de la Patagonie (avec préface de François Tulli - lobby patagon oblige!): la première édition de 1954 était épuisée depuis longtemps, n'hésitez donc pas à commander cet ouvrage, fort intéressant complément aux ouvrages de notre Consul général... 100F.

Dusquesne Diffusion, 27 ave Dusquesne, PARIS 7ème
Ed Godefroy de Bouillon.

 

Préface

La Patagonie, extrême sud de l'Amérique du Sud , eut un roi: un homme seul, qui ne tint son titre que de sa seule ambition, d'une grande imagination et d'une forte dose de témérité.
........C'était avec la ferme volonté de conquérir les terres de Patagonie et d'Araucanie, d'y proclamer une monarchie et d'offrir son alliance à Napoléon III, que le Français Antoine de Tounens, avoué à Périgueux, quitta sa Dordogne natale en 1860. Rêvant à ces territoires sur lesquels il avait jeté son dévolu et à cette " Nouvelle France " qu'il comptait instaurer là-bas, il débarqua seul, après une longue et périlleuse traversée, à Valdivia, port chilien de la côté Pacifique. Toutes ses richesses tenaient alors dans une malle: le sceau de l'État, un sabre de cavalerie, deux drapeaux de son futur royaume, quelques exemplaires de la Constitution qu'il avait rédigée, des " pesos patagons " frappés spécialement à Paris ainsi que divers uniformes militaires.
........Antoine de Tounens parvint à rencontrer les chefs de milliers d'Indiens en lutte à l'époque pour conserver leurs terres, leurs libertés et leurs coutumes ancestrales menacées par l'envahisseur chilien, et à se faire reconnaître comme leur "libérateur". Au soir du 16 novembre 1860, voici Antoine de Tounens devenu souverain, par la grâce de Dieu et la volonté des Indiens de ces contrées du bout du monde. Les aventures d'Orélie-Antoine 1er ne font que commencer : après avoir combattu à la tête de ses Indiens Araucans et Patagons, le Roi fut trahi, capturé par les troupes chiliennes et enfermé, condamné, accusé de folie pour être finalement contraint à l'exil et remis à un navire de guerre français. Pendant six ans, Orélie-Antoine 1er fait des efforts désespérés pour intéresser la France et les Français à sa glorieuse épopée et au royaume de Patagonie et d'Araucanie, écrivant à l'Empereur Napoléon III, " son cousin "..., et au pape publiant à Paris la Relation de son avènement au trône, sa captivité au Chili et d'autres manifestes.
........Ces démarches ne suscitèrent qu'indifférence et dérision. Orélie-Antoine retourna en Patagonie sous de nouvelles identités. Il assista au massacre de ses derniers sujets ou à leur soumission. Désespéré, abandonné et solitaire il regagnera la France.
........Antoine de Tounens est mort où il était né dans le petit village de Tourtoirac, ruiné, oublié de tous, dans la seule compagnie de ses décrets royaux, de ses étendards et des ordres qu'il avait fondés. Et il ne reste rien-ou presque rien-, là-bas, où le vent et la pluie règnent seuls, de cet unique et mythique roi qu'ait connu la Patagonie.
........C'est cette formidable aventure, - tombée dans l'oubli jusqu'aux années 1950, mais connue de tous ceux qui "embarqués" aux côtés de l'écrivain Jean Raspail ont attrapé le virus patagon, et de quelques heureux bibliophiles possédant dans leur bibliothèque la première édition du "Roi Blanc des Patagons", publiée en 1964 chez André Bonne à Paris (illustrée par Amandine Doré) -, que vous allez avoir le plaisir de lire.
........Saint- Loup, de son vrai nom Marc Augier fut en effet l'un des tous premiers Français, avec Léo Magne peu auparavant, à redécouvrir la belle histoire d'Antoine de Tounens. Saint-Loup ne pouvait qu'être séduit par ce conquistador à la française, ce Cyrano de Tourtoirac comme il aima l'appeler dans la préface de la première édition du "Roi Blanc des Patagons" . Lui-même éprouva toute sa vie un profond besoin d'évasion et de dépassement qui le conduisirent du Sahara... à la Patagonie, en passant par les régions Arctiques, le Maroc, les États-Unis, l'Espagne franquiste et l'URSS communiste.
........Passionné par le monde vertical et libre des montagnes, Saint-Loup partit au lendemain de la guerre en Amérique du Sud. Figure marquante de l'alpinisme international, il avait en effet été sollicité en 1947 par le gouvernement de la République Argentine pour être conseiller technique pour l'armée de montagne. Ce fut l'occasion pour ce sportif de haut niveau d'organiser de nombreuses randonnées aventureuses à la découverte de la Cordillère des Andes et de l'archipel Fuégien. Il parcourra ainsi plus de 15.000 km en Patagonie australe et fraya notamment alors la route à l'expédition française victorieuse du fameux Fitz Roy , en 1951. C'est sûrement ainsi, en marchant dans ces régions désolées, et en prenant connaissance des archives des bibliothèques de Buenos Aires, de Santiago del Chile et de la Plata qu'il tomba sur les traces de son étrange et fantasque compatriote Antoine de Tounens. S'étant pris naturellement d'une grande admiration et d'un profond attachement pour ce " Roi Blanc des Patagons ", ce n'est qu'en 1964 que Saint-Loup écrivit l'extraordinaire aventure d'Antoine de Tounens. Cette biographie n'avait pas été rééditée depuis et l'on ne peut que se réjouir et remercier les Éditions Godefroy de Bouillon de porter à la connaissance de la jeunesse française et des moins jeunes cette belle histoire. Le Roi Blanc des Patagons leur permettra peut-être d'aller chercher ailleurs ce que notre fin de siècle, que toute grandeur étonne et que toute noblesse effraie, n'est plus en mesure de leur proposer.
........Car il faut savoir , qu'aujourd'hui encore, le petit cimetière du village de Tourtoirac reçoit régulièrement la visite d'étranges pèlerins ... Des fleurs bleues, blanches et vertes sont souvent déposées sur une tombe qu'il faut savoir "dénicher", ornée d'une couronne royale et dont l'épitaphe, de plus en plus difficile à lire, est seule à rappeler qu'Antoine de Tounens, décédé à Tourtoirac le 17 septembre 1878 portait le nom d'Orélie-Antoine 1er et le titre de Roi d'Araucanie et de Patagonie. En effet, le roi est mort, mais son royaume est éternel ... Majesté, nous voilà !

 

François TULLI